"Les enfants ! Regardez les iguanes au bord de la piste d'atterrissage ! ... vous vous rendez compte qu'on est aux Galápagos ?! C'est fou !!"
Voilà les premières paroles enthousiastes que j'ai prononcé lors de notre atterrissage à Baltra. Arborant alors à partir de là, à peu près la même expression que celle bien connue des visages des gamins qui franchissent les portiques de Disneyland la première fois...
Le bus qui relie l'aéroport au bateau nous permettant de rejoindre l'île principale de Santa Cruz nous fait traverser le nord, dans le secteur de l'aéroport, et voici déjà que l'atmosphère si particulière de ces lieux commence à nous imprégner. Les pierres volcaniques recouvrent un sol ponctué de cactus, dont le développement témoigne de leur âge déjà bien avancé.
Arrivés au bateau, une première mangrove borde la jetée. Les pélicans pêchent avec fracas et peu de grâce dans cette eau couleur bleu-vif, dont la teinte s'accentue dès que le soleil rayonne un temps soit peu.
Sur l'autre rive, un taxi nous mène jusqu'à notre hôtel, situé en plein centre de la ville de Puerto Ayora au sud de l'île. Mais en chemin, nous lui demandons de nous arrêter au site de Gemelos, deux gouffres naturels creusés par la lave et recouverts d'une végétation tropicale. Leur dimension nous impressione.
Un peu plus loin, nous faisons une halte dans le ranch "El Chato", réputé pour la préservation de tortues terrestres et les tunnels naturels formés par la lave. Le spectacle qui nous attend est au delà de ce que nous imaginions. La taille des tortues que nous observons ici dépasse de loin l'idée préconçue que nous avions de ces animaux. Elles sont si imposantes que les carapaces exposées à l'entrée du ranch permettent à un adulte de se glisser à l'intérieur le temps d'une photo. Nous restons un bon moment à les observer se déplacer, plus rapidement que nous le pensions, soulevant leur masse en poussant des gémissement rauques venus de l'au delà, dignes d'un patient ayant subi une trachéotomie. Nous empruntons les tunnels de lave avec la sensation de pénétrer dans les entrailles de la terre, puis retrouvons notre chauffeur qui patiente tranquillement avec ses collègues autour d'un café des Galápagos.
Au sud de Santa Cruz, le paysage est plus verdoyant, et avec les premières habitations, les arbres fruitiers font également leur apparition. Bananes, papayes, avocats, mangues, café, ananas,... font l'abondance de ces lieux protégés de toute culture autre que celles existantes sur l'île.
Voilà seulement 3 heures que nous sommes ici, et déjà les émotions et souvenirs se bousculent dans nos têtes.
Le séjour promet d'être riche.
Mercredi 16 octobre. Impossible de parler des Galápagos sans en évoquer Charles Darwin. Ce matin, nous profitons de notre séjour sur Santa Cruz pour aller visiter le centre de recherche et de protection des tortues et des iguanes qui porte son nom. En chemin nous passons devant le petit, mais néanmoins très réputé, stand de marché de poissons. Ici, un lion de mer et des pélicans y ont leurs habitudes, venant réclamer chaque jour les restes, tels des animaux domestiques. Drôle de spectacle que nous prenons plaisir à observer.
Au centre Darwin, un squelette de baleine marquera les enfants, qui découvrent également ici les travaux de recherches et le parcours de vie de ce célèbre chercheur. Les tortues présentes dans les parcs extérieurs sont moins impressionnantes que celles observées hier, mais ont l'avantage d'être en train de se nourrir lors de notre passage, ce qui complète notre observation.
Après cette matinée sous le signe des sciences naturelles, direction la plage pour un premier PMT (Palmes Masque Tuba). Sur les roches noires qui bordent la mer, des centaines d'iguanes de même couleur profitent du soleil et de la chaleur de ces pierres. Pendant que les crabes, rouge flamboyant et bleus, accompagnés de leurs juvéniles tout aussi noirs que les iguanes, déambulent au milieu des pierres les plus humides.
L'après-midi, c'est en bateau que nous rejoignons le secteur ouest afin de nous rendre au belvédère de Las Grietas. Nous traversons des paysages de pierres volcaniques et de cactus centenaires et passons à côté de salines. La densité de ce paysage, qui réduit le passage au simple sentier qui le traverse, nous plonge dans une atmosphère très spéciale. L'impression de remonter le temps...
La fraîcheur de l'eau du couloir de Las Grietas viendra casser la motivation des plongeurs que nous sommes. Et c'est à la plage voisine bordée par la mangrove, que nous enfilons nos combis, parés à découvrir les mondes sous-marin. À peine équipés, le passage de 2 raies aigles en bordure de plage nous renseigne immédiatement sur la diversité qui nous attend. Et effectivement, à peine quelques minutes plus tard, nous observons nos premiers requins gris, raies aigles, poissons flûte, poissons perroquet,...
Une première pour les enfants dont le sourire et l'extase fait plaisir à voir.
Jeudi 17 octobre. Après cette première mise en bouche, direction l'île d'Isabela à la forme caractéristique représentant un hippocampe.
Sous le ponton qui nous mène au bateau, le balai des raies aigles et des requins gris semble vouloir nous saluer.
Pendant 2 heures, les 3 moteurs de 250 chevaux lancés à pleine vitesse vont malmener la plupart des voyageurs qui nous accompagnent. Bien contents de retrouver le calme et la stabilité de la terre ferme, nous sommes accueillis sur la verdoyante île d'Isabela par une colonie de manchots et plusieurs lions de mer ayant élu domicile sur la jetée. Chouette spectacle.
Au coucher de soleil, les familles de lions de mer colonisent la petite plage près du port, les bébés y tètent leur mère en toute quiétude, l'occasion de scènes de la vie sauvage que l'on ne se lasse pas d'observer...
Au matin de ce 4ème jour, nous rejoignons la crique de Concha Perla, qui borde le port, le temps d'un PMT en famille.
Incroyable...
Tortue, requins, raies aigles, étoiles de mer et poissons en tous genres y sont présents. Les enfants sont émerveillés et nous n'en revenons pas de pouvoir observer tant d'animaux marins aussi facilement.
Après le déjeuner, nous décidons de rester un peu au sec en partant découvrir le mur des larmes, témoin de l'histoire des Galápagos. Construit entièrement en pierres volcaniques, sur 9m de haut et 6m de large à sa base, ce mur totalement inutile est le fruit du travail de força des prisonniers de l'île entre 1945 et 1959.
Pendant les 6km qui nous relient à notre bungalow, les enfants s'amusent à chercher les tortues de terre dissimulées au milieu de la végétation dense qui borde le chemin. Pas facile de repérer leur carapace aux teintes camouflage militaire... Ils en trouveront tout de même 6, grâce à l'oil aiguisé de Yannick qui a compris comment les repérer !
Lors de l'excursion à Las Túnelas le lendemain, les fonds marins seront tout aussi riches, et c'est ici que les enfants vont y découvrir leurs premiers hippocampes, requins noirs et requins à pointe blanche. Pablo aura également l'occasion de caresser la carapace d'une tortue marine...une expérience dont il nous parle encore !
Ici, le paysage environnent est magnifique. Façonnées par la mer et les coulées de laves, les cavités de roches noires forment des bassines dans lesquelles la faune sous marine y trouve refuge, abritée des vagues et des courants violants qu'il nous a fallu franchir en bateau pour arriver jusqu'ici.
Sur terre, nous découvrons les premiers fous à pattes bleues, cet oiseau emblématique des Galápagos. Instant mémorable lors de l'observation inopinée de deux oufs, protégés par l'un des deux congénères veillant sur sa progéniture. Le guide nous explique qu'il est rare de pouvoir les observer ainsi, à ces mots nous mesurons alors notre chance.
Le retour en bateau jusqu'au port sera moins sportif qu'à l'aller mais malgré tout, la puissance des vagues traversées nous renvoie à une grande humilité... Tiens ! Trois raies manta !
Dimanche 20 octobre. Après les fonds marins, nous prenons de la hauteur avec la visite du volcan Sierra Negra, au cratère d'un diamètre de 8km, et dont la dernière éruption date de 2018.
Les Galapagos sont des îles volcaniques, et tous les volcans d'Isabela sont encore en activité.
Malgré la paresse de notre guide qui s'est mis en tête qu'en présence de Lou et Pablo, l'accès au premier point d'observation situé à 45min de marche nous serait bien suffisant...nous lui imposons notre rythme et le trainons tant bien que mal pendant 3h30 de marche ! Bien décidés à profiter pleinement des différents points de vue sur le volcan.
Malgré un soleil intense et une chaleur écrasante, le spectacle en vaut la chandelle et nous nous sentons infiniment petits à côté de ce mastodonte dont la puissance n'a pas besoin d'être observée pour être ressentie.
De retour au pick-up, le visage dégoulinant et rougi par l'effort imprévu et non décidé que notre guide vient de supporter, exprime toute la satisfaction d'être enfin de retour en position assise, face à la fraîcheur de l'air conditionné... Les enfants s'amusent de cette situation, mais Pablo, pris de pitié pour ce pauvre homme, tentera de me faire culpabiliser d'avoir failli causer à sa perte en restant ainsi devant avec Lou d'un pas décidé. Je regarde une dernière fois son visage déformé par la fatigue à travers le rétroviseur intérieur...et fini par attraper le fou rire !
Nous conservons le rythme sportif que nous impose la découverte de ces îles et terminons notre séjour sur Isabela par un dernier PMT à Tintoreras, un petit îlots rocheux abritant manchots, iguanes et lions de mer, à 5min de navigation du port.
Nouveau site et nouvelle expérience... Ici, dans les couloirs de roches, nous évoluons dans l'eau en surplombant des dizaines de requins à pointe blanche juste en dessous de nous. Lou, remontée juste avant sur le bateau à cause du froid aura tout de même pu observer sa première raie pastenague et plusieurs tortues, dont la carapace atteint des dimensions qu'avec Yannick, nous n'avions jamais observé lors de nos précédentes plongées. Pablo frissonne de cette expérience incroyable qu'il vient de vivre à seulement 9 ans.
En remontant sur le bateau, après avoir été salués par 2 raies aigles passant par là, je suis émue de ces étoiles que je vois scintiller dans les yeux de nos enfants...
Mardi 22 octobre. Après un passage par Santa Cruz, nous reprenons le bateau en direction de l'île San Cristóbal. Derrière les vagues formées par la puissance des moteurs, quelques dauphins font des pirouettes. Nouveau cadeau de dame nature.
Accueillis à la descente du bateau par le charmant et très souriant propriétaire de notre appartement, nous nous installons rapidement avant de partir réserver nos billets pour un tour 360 de cette île.
Les fous à pattes bleues et les lions de mers sont ici présents en quantité incroyable à proximité du port. Et il est toujours remarquable de voir l'élévation et la vitesse de plongée des fous en train de pêcher. On dirait des missiles. Impressionnant !
Dépourvus de notre carapace depuis maintenant 10 jours, notre tortue ne va pourtant pas manquer de nous rappeler à son bon souvenir...
Restée stationnée dans un quartier huppé de Lima, des voyageurs venus bivouaquer dans le quartier ont remarqué des autocollants des autorités, tout juste collés sur notre pare-brise, et indiquant que le véhicule semble être abandonné. Repérant l'adresse de notre site sur la carrosserie, ils nous préviennent alors par message.
Sans déplacement dans un délai de 72 heures, le camping-car sera évacué.
Immédiatement, je contacte Stéphane, notre ange gardien à Lima, chez qui nous avions fêter l'anniversaire de Lou. Grâce au courrier rédigé par ses soins, nous finirons notre séjour ici, m'évitant ainsi un retour anticipé que nous étions en train d'organiser. Nous n'apprendrons qu'à notre retour, que l'histoire, que nous ne pensions n'être qu'une formalité administrative, à tout de même conduit le chauffeur de Stéphane jusqu'au poste de police ! Venu prendre des photos du véhicule, il s'y est vu mené de force par les riverains, mécontents de ce stationnement trop long à leurs yeux. Ressorti sans être inquiété par la situation, nous sommes néanmoins très reconnaissant envers Stéphane et Carlos qui nous ont offert une aide inestimable et très précieuse en pareilles circonstances, et nous en voulons beaucoup d'avoir provoqué pareille situation...
Jeudi 23 octobre.
Hier, avec Yannick et Pablo, nous avons profité du caractère joueur et curieux d'un lion de mer lors d'un nouveau PMT dans la crique de Bahía Tijeretas. Un moment magique que nous avons prolongé avec Pablo. Le froid ayant malheureusement eu raison de Lou puis de Yannick.
Coincés entre les rochers avec des vagues devenant menaçantes pour la sécurité de Pablo, le lion de mer s'est jeté sur nous, me laissant tout juste le temps de l'éviter. Décidés à lui laisser plus d'espace, nous nous éloignons plus au large...mais c'était sans compter sur son souhait de poursuivre notre complicité naissante. Pendant plusieurs minutes, l'animal restera ainsi en notre compagnie, jouant parfois avec les grosses tortues passant par là, et plongeant à d'autres moments, farfouillant sous les pierres à la recherche de quelques poissons. Génial !
En sortant de l'eau au milieu des lions de mer, dont le papa menaçant chassera tout le genre humain présent aux alentours, j'oublie les soucis de notre grosse tortue et arbore à nouveau ce faciès de gamine insouciante et heureuse.
Ayant encore en tête cette rencontre privilégiée avec ce lion de mer, nous partons ce matin pour un tour 360, avec pour premier arrêt, le très réputé site de Kicker Rock (ou León Dormido) au large nord-ouest de San Cristóbal.
Malheureusement, depuis le réveil l'état de santé de Pablo n'est pas rassurant. Plus chaud que d'habitude et se plaignant de maux de ventre, il ne lui faudra que quelques minutes et 2 tortues de mer pour le faire remonter frigorifié sur le bateau.
Je suis déçue pour lui, car quel spectacle s'offre alors à nous...
Ici c'est le bouquet final de ce magnifique feu d'artifice : requins marteau, requins pointe blanche, banc de 12 requins gris, raies aigles, tortues à foison, poissons globe, oursins de la taille d'un ballon de foot, poissons en tous genres...! Le tout au milieu d'un décor grandiose que forment ce couloir entre 2 falaises isolées au milieu de l'océan, et qui sont colonisées sous l'eau par des milliers d'organismes aux couleurs aussi variées qu'un arc en ciel, et éclairées par les rayons du soleil sortis spécialement de la couche nuageuse à ce moment là...
Un spectacle inoubliable.
Et que l'on aurait envie de faire perdurer si le guide n'était pas là pour nous faire poursuivre nos découvertes prévues dans le programme de cette grande journée.
Mais à partir de ce qui est, sans le savoir, le dernier souvenir fabuleux de notre séjour ici, mon état de santé va lui aussi se dégrader subitement, au point de ne plus pouvoir bouger du bateau...
Journée interminable pour cette dernière excursion en famille.
Yannick et Lou profiteront en duo des sites présentés par notre guide, heureux de cette nouvelle journée de découverte.
Pendant les 48h qui nous séparent de notre vol pour Quito, nous ne quitterons plus l'appartement avec Pablo, hormis pour la navette indispensable à notre retour sur l'île de Santa Cruz. L'intoxication alimentaire que nous avons attrapé est violente, et je remercie le destin d'avoir pu échapper à un retour anticipé seule vers Lima.
Dimanche 28 octobre. C'est non sans une certaine nostalgie que nous laissons derrière nous ce petit paradis. Nous promettant avec Yannick d'y revenir un jour, peut-être en croisière plongée cette fois-ci...
Arrivés à Quito, c'est de nuit que nous parcourons le centre historique, et ses nombreuses églises qui le compose. Rapidement, la beauté de ces monuments nous permet de comprendre pourquoi elle est classée au patrimoine mondial.
Le lendemain matin, dès 5h, nous montons dans un taxi qui aurait pu tourner dans les films du même nom, tant son chauffeur se prend pour Samy Naceri au milieu de Marseille ! Au point que mon instinct de survie en arrive à lui rappeler de manière ferme que nous ne sommes pas dans une course et qu'il est prié de ralentir. Par chance pour notre sécurité, il s'exécutera sans répliquer.
Pendant 36h, nous allons traverser l'Equateur pour rejoindre la panaméricaine au Pérou, route déjà empruntée deux fois ce mois-ci...
Le bus est pour nous l'occasion de découvrir une partie de ce pays que les manifestations nous ont contraint d'éviter. Alors, nous observons attentivement l'organisation des villes et villages traversés, les cultures de café et de bananes, ou encore les paysages très verdoyants et souvent vallonnés que nous n'aurons pas la possibilité d'explorer pour l'instant.
Enfin, après un trajet pendant lequel j'ai dû perdre le peu d'énergie dont je disposais encore, et alors que Pablo semble lui retrouver la forme, nous retrouvons enfin notre tortue, à la carapace couverte d'autocollants peu hospitaliers.
Ce soir, Yannick et les enfants profiteront du passage par Lima de la Franklin Family, cette famille française rencontrée à la réserve Del Ibera en Argentine, pour partager le récit des 3 mois de voyage qui nous séparent de notre première rencontre. Trop faible pour les accompagner au restaurant, je profiterai de cette soirée au calme pour tenter de retrouver un sans blanc d'énergie...
Mercredi 30 octobre. Au revoir Lima.
Il est temps pour nous de refermer une nouvelle page, et pour moi de trouver un traitement adapté me permettant de retrouver la santé.
Les informations nous annoncent le retour à la normale de l'état politique du Chili, alors profitons de cette accalmie.
Un dernier détour aux bureaux de Stéphane afin de le remercier chaleureusement et de le saluer une dernière fois, une halte rapide à l'exposition sur les robots présentée à la fundación Telefonica et on reprend le voyage, en route vers le sud !